Alors que s’est tenu à Paris, le 18 mai dernier, le Sommet sur le financement durable des économies africaines, le président français Emmanuel Macron a proposé aux pays du continent un « New Deal » dont les contours gagnent à être définis en collaboration avec les principaux intéressés.
On se souvient que l’expression de New Deal (« Nouvelle donne ») avait été utilisée aux lendemains de la crise de 1929 par le président américain Roosevelt pour redonner confiance aux investisseurs et relancer l’économie de son propre pays. Si au sortir de la crise liée à la pandémie de Covid-19 qui risque de voir le continent africain connaître sa première récession depuis 25 ans, des solutions pérennes pour pallier les difficultés des économies africaines sont espérées, il est étonnant que les modalités en soient fixées par le président français. Il est vrai qu’il était l’hôte du Sommet sur le financement durable des économies africaines, incluant une fois n’est pas coutume les pays anglophones et lusophones du continent.
La situation actuelle de ce dernier reste, en raison de la crise sanitaire, des plus alarmantes et témoigne des déséquilibres structurels qui opposent encore les pays du Nord et ceux du Sud. En 2020, plus de 30 millions d’Africains ont basculé dans l’extrême pauvreté. La dette publique de nombreux États se creuse et plusieurs pays risquent le défaut de paiement. Sur l’ensemble des vaccinations réalisées à ce jour, seul 1% a bénéficié au continent africain. Des vœux pieux et des demi-mesures ne suffiront pas à sortir les pays de la spirale de surendettement qui est la leur. La présence d’organisations internationales telles que le FMI ou la Banque Mondiale au Sommet organisé à Paris fait redouter que les solutions du passé : mesures d’austérité ou recours abusif aux secteurs privés, continuent d’apparaître comme la panacée.
Au-delà des conséquences désastreuses liées à l’évasion fiscale des multinationales présentes sur le continent, la France s’honorerait de mettre surtout en conformité ses paroles avec ses actes, en commençant par cesser de soutenir des projets de financement à destination des énergies fossiles, comme celui de liquéfaction et stockage de gaz au Mozambique ou la construction par Total, dans le cadre du projet EACOP, d’un oléoduc reliant les champs pétrolifères ougandais et le port tanzanien de Tanga, privant les populations locales de leurs moyens de subsistance. Mais n’est-ce pas la Chine, qui en détenant 20% de la dette publique extérieure des pays africains, là où la France n’en détient que 3%, est le mieux à même de seconder les pays du continent dans leur demande d’un rééchelonnement de leurs emprunts, notamment afin de soutenir une croissance verte des plus urgentes ?
Au final, si comme le reconnaît Emmanuel Macron, « l’Afrique a tout pour réussir », on ne peut que souhaiter que cette nouvelle donne proposée par le président de la République se traduise par de nouveaux partenariats et de plus franches collaborations, laissant au continent africain les mains libres pour prendre en main le destin qui doit être désormais le sien. La promesse que les droits de tirage spéciaux (DTS), ces actifs monétaires du FMI pouvant être convertis en devises, puissent être réalloués vers les pays du continent, et notamment à destination de la Banque africaine de développement, constituera sans nul doute un levier pérenne de croissance économique et de progrès social.